Amiante : des malades amputés de leurs droits
décembre 14, 2015 12:02 pm
Prochaine mobilisation devant la cour d’appel d’Aix les Milles, le 16 décembre.
Vendredi, 10h, devant le Palais Leclerc, à Toulon. Une bonne centaine de personnes attendent sur le trottoir. Et la salle d’audience du Tribunal des affaires de Sécurité sociale (Tass) de Toulon est archi-pleine.
« Nous ne pouvons accepter un tel recul, une telle dégradation dans les indemnisations accordées aux victimes », commence Jean Herquin (Asava), pour le Comité amiante Paca.
« A cet appel commun au rassemblement de l’Asava et de la Mutuelle de la Méditerranée, participe aujourd’hui une délégation de l’Ademivap (Martigues) et de l’association Centaure (La Ciotat). C’est dire combien la situation au Tass de Toulon préoccupe au-delà de la ville et du département. »
Les raisons du malaise : les coupes sombres pratiquées par ce tribunal dans les indemnisations accordées aux victimes.
Le militant associatif poursuit en relatant un exemple plutôt symptomatique : « Jean-Claude Richerme, un garçon qui a des plaques pleurales, s’est vu attribuer par le ministère de la Défense une indemnité de 14 000 euros. Jusqu’à maintenant quand, avec la victime et nos avocats, nous considérions que cette indemnité plancher n’était pas suffisante au regard du préjudice, nous venions réclamer un complément d’indemnisation devant le Tribunal des affaires de Sécurité sociale. Et nous étions entendus… »
« Vous n’êtes pas à la Bourse du travail »
Cette fois-ci, ce sera que dalle ! « Le tribunal a renvoyé la victime sans lui accorder un euro de plus. »
Et concernant les audiences de la journée, de toute évidence, les choses ont l’air plutôt mal engagées. Du moins dans l’esprit.
« Ce matin, ce monsieur, ce petit juge, lorsque notre avocate maître Sylvie Topaloff a commencé à plaider – avec une salle remplie de victimes de l’amiante – s’est permis de la couper et de lui dire : “Vous n’êtes pas à la Bourse du travail ici.” Un accent d’anti-syndicalisme qui commence vraiment à bien faire. »
Jean Herquin prévient : « S’il faut qu’on revienne régulièrement lui parler des victimes de l’amiante, nous reviendrons. C’est la première fois qu’on fait ça mais ça serait bien qu’il entende le message. »
Une situation d’autant plus inexcusable pour les associations que les responsabilités sont établies. Et les conséquences sanitaires, dramatiques, connues.« Il faut arrêter de spolier les victimes, elles n’y sont pour rien dans le drame qu’elles vivent. Elles ne demandaient qu’une chose : d’aller travailler. Et c’est en allant travailler que les employeurs les ont empoisonnées. Elles sont donc en droit d’exiger que justice leur soit rendue. » D’évidence.
La pilule de l’austérité ne passe pas davantage : « Si on comprend qu’il y a une conjoncture économique qui pousse à ce qu’on réduise les indemnités des maladies professionnelles c’est une doctrine qu’on ne partage pas et qu’on combat… », explique le militant associatif.
Depuis fin 2013 – depuis donc la prise de fonction du juge Cabaret, l’actuel président du Tribunal des affaires de Sécurité sociale de Toulon -, Jean Herquin confirme que les indemnisations ont été amputées.
Une situation qui ne serait pas isolée puisque le Tass de Marseille est lui aussi montré du doigt par le Comité. « Ce président a là aussi un tel comportement qu’on va demander à ce que les dossiers lui soient retirés pour suspicion légitime. »
« L’objectif, c’est de sortir les plaques pleurales des maladies professionnelles parce que ça représente 65% des pathologies de l’amiante aujourd’hui en France. Ils veulent faire des économies sur le dos des victimes… » Et ça, il n’en est pas question.
Thierry Turpin