Amiante : le long chemin de croix des anciens des CMP
juin 23, 2015 5:14 pm Laissez vos commentairesLA PROVENCE 16 juin 2015 ARLES
Les 93 ex-salariés ont été renvoyés devant un juge par les prud’hommes
Sylvain Pignol
La déception était grande, au sortir des quelques minutes qu’il aura fallu aux ex-salariés des CMP (Constructions métalliques préfabrication) Arles pour comprendre qu’ils n’auraient toujours pas de réponse à leurs demandes. Cette fois-ci, ils étaient 93 à réclamer des indemnités pour le préjudice d’anxiété. “Les gars qui ont travaillé dans des usines amiantées ont une épée de Damoclès au-dessus de la tête : ils ne savent pas s’ils ne vont pas développer une maladie dans les années à venir”, résume Jacques Fray, président de l’Avapa (Association des victimes de l’amiante en pays d’Arles).
Après avoir été reportée une première fois, puis une seconde pour cause de mouvement de grogne, l’affaire avait finalement été étudiée par le conseil des prud’hommes (CPH) d’Arles en mars dernier.
Mais hier, le délibéré a été une douche froide puisque le président annonçait le renvoi devant le juge départiteur. En clair, les magistrats consulaires, composés à la fois de représentants des syndicats et des chefs d’entreprise, n’ont pas pu se mettre d’accord. L’affaire sera donc jugée par un magistrat professionnel. “C’est renvoyé ? C’était pas la peine de nous faire venir”, entendait-on dans les couloirs du tribunal.
“Il va reconvoquer tout le monde, les avocats des CMP et de l’association, et c’est lui qui va trancher, éclairait Jacques Fray à l’issue de l’audience express. Pour les 104 premiers, ça s’était bien passé.” Ceux-ci s’étaient en effet vus accorder 10 000 € chacun par le CPH d’Arles l’an dernier, décision qui a fait l’objet d’un appel.
L’Avapa et les “CMP” espèrent donc que le nouveau juge nommé sera aussi compréhensif, même s’ils ont des doutes. “Le patronat arlésien a dû faire pression, analysait son président. Les cours d’appel et les conseils de prud’hommes ont une pression énorme de la part du Medef pour réduire au maximum les indemnités. Au départ, nous avions présenté 13 dossiers d’anciens des CMP, qui ont eu gain de cause en appel le 4 juillet 2014. C’est une avancée, le préjudice d’anxiété est reconnu. Mais aucun n’a obtenu la même somme, toutes les indemnités ont été individualisées. Et en plus, depuis l’an dernier, aucun n’a touché la somme due.”
L’Avapa envisage donc une action auprès du groupe Valfond, propriétaire des CMP, pour récupérer les sommes allouées. Il y a urgence. “Depuis 2009, date à laquelle nous avons créé l’association, 15 de nos camarades sont décédés à cause de l’amiante. On vient encore de perdre un collègue il y a un mois et demi”, comptabilise Jacques Fray. Selon lui, l’audience devant le juge départiteur devrait avoir lieu “sous trois ou quatre mois”.
D’ici là, les ex-CMP devront prendre leur mal et leurs angoisses en patience.