La Cour de cassation examine ce mercredi l’indemnisation du préjudice de « bouleversement dans les conditions d’existence » des personnes contaminées par l’amiante.

août 28, 2013 9:07 am Publié par Laissez vos commentaires

Le 10 juillet à 14 heures, la chambre sociale de la Cour de cassation se penchera sur le cas d’anciens salariés exposés à l’amiante. Les magistrats devront apprécier si l’angoisse d’être un jour atteint d’une maladie mortelle ampute leur projet d’avenir et les empêche de profiter pleinement de l’existence. Une affaire avec de forts enjeux, car tous les salariés exposés à un produit cancérogène pourraient être concernés.

Il va falloir beaucoup de sérénité aux magistrats de la Cour de cassation, ce mercredi 10 juillet, pour examiner trois volumineux dossiers d’indemnisation de personnes ayant été exposées à l’amiante. En effet, les enjeux sont énormes et les avocats des entreprises l’ont bien compris qui ont multiplié les manœuvres procédurales pour éviter de reproduire avec le préjudice de « bouleversement dans les conditions d’existence » ce qui s’est déjà passé avec l’indemnisation du préjudice d’ « anxiété ». On se souvient qu’en mai 2010, la Cour de cassation avait reconnu un préjudice d’ « anxiété » pour des anciens salariés de la société ZF Masson, non malades, mais qui ont été exposés pendant des années à un matériau cancérogène. Elles sont condamnées à vivre dans l’angoisse, qu’au grès des examens médicaux de suivi, on ne leur découvre une pathologie engageant le pronostic vital. Depuis, un préjudice dit de « bouleversement dans les conditions d’existence » a été reconnu et indemnisé par la Cour d’appel de Paris, toujours à propos des anciens salariés de la société ZF Masson, et par la Cour d’appel d’Agen, en faveur des anciens salariés de la société Babcock Wanson. En revanche la Cour d’appel de Toulouse a rejeté l’indemnisation de ce préjudice pour les anciens salariés de la société Alhstrom Label Pack.

Ce préjudice de « bouleversement dans les conditions d’existence » est en quelque sorte l’une des conséquences d’une perte d’espérance de vie. L’angoisse d’être un jour atteint d’une pathologie grave, sans cesse réactivée par le suivi médical et la découverte de maladies chez des anciens collègues de travail, « ampute les projets d’avenir », selon les termes utilisés de la cour d’appel de Paris. Elle pénalise les personnes qui ont été ainsi exposés à un risque mortel en ne leur permettant pas de profiter pleinement de l’existence.

Evidemment, si les magistrats de la Cour suprême font droit aux demandes, ce sera à coup sûr un « bouleversement » dans la prévention et la réparation des risques professionnels. A terme, en effet, cela pourrait concerner tous les salariés qui ont été exposés à un risque cancérogène, bien au-delà de l’amiante.

Individuellement, les sommes en jeu restent relativement modestes (entre 3000 et 15 000 € pour chacun de ces deux préjudices), mais compte tenu du nombre de salariés exposés en France, cela devrait constituer une incitation forte à la prévention, celle-ci devenant du même coup beaucoup plus rentable.

L’Andeva et ses associations régionales très impliquées dans la défense de ces dossiers (Cerader 24, Adeva Yonne, Allo Amiante, Cerader 47, mineurs CFDT de Lorraine, Adeva centre…), seront présentes ce mercredi devant la chambre sociale de la Cour de cassation. Un point presse sera tenu. Les journalistes pourront rencontrer des salariés qui ont engagé cette procédure et qui, aujourd’hui, sont malades de l’amiante. L’angoisse de la maladie et ce qu’elle entraîne dans la vie quotidienne de salariés devenus victimes ne sont pas que des formulations juridiques théoriques.